Le Sahara Occidental interdit de visite ?

Décidément les visiteurs européens ne sont pas les bienvenus quand ils s’intéressent de trop près à la situation du respect des droits humains au Sahara Occidental occupé par le royaume marocain depuis 1975. Après l’arrestation de syndicalistes espagnols,français et italiens en février, c’est une mission d’observation française qui a été arrêtée puis expulsée cette nuit du Maroc.


Arrivée à Marrakèch dimanche 20 avril pour une mission d’observation, la délégation a commencé son travail le lendemain lors de la séance du procès d’Enaama Asfari, co-président du CORELSO (Comité pour le Respect des Libertés et des droits humains au Sahara Occidental) dont les autorités marocaines entendent neutraliser l’activité en fabriquant une procédure judiciaire de délit de droit commun. France Weyl, avocate et militante de l’association Droit et Liberté a également assisté au procès (voir le rapport en annexe).

Une nouvelle séance a été fixée 8 jours plus tard, les témoins de l’accusation n’étant pas d’accord pour décrire « agression » contre une automobiliste dont on accuse ce militant qui se savait suivi jour et nuit par la police. Difficile d’imaginer qu’il aurait agressé une femme sous les yeux attentifs de la police secrète marocaine !!

Accusé également de « conduite en état d’ivresse » alors qu’aucun examen d’alcoolémie n’a été réalisé, de « possession d’arme blanche », alors qu’aucune arme n’a été produite à l’audience, on le voit, Justice et Police marocaines ont toujours de gros progrès à faire pour arriver sur le chemin du respect des droits de la personnes.

Le militant a été arrêté et détenu au secret durant 3 jours au cours desquels il a été torture. Il n’a pu joindre ni famille, ni avocat ni médecin durant cette période. Il a été interrogé sur son activité politique en faveur du peuple sahraoui, particulièrement sur les rencontres qu’il a faites en France lors d’une réunion privée organisée à l’Assemblée Nationale par Jean Paul Lecoq, député de Seine Maritime. (On ne peut pas dire que les services de police français et marocains ne travaillent pas la main dans la main !)On le voit, on est bien loin d’une affaire de droit commun.

La mission a poursuivi son travail en se rendant à Tan Tan où vit une nombreuses communauté sahraouie. Elle était composée de

– Claude Mangin-Asfari, membre du CORELSO

– Frédérique Lellouche, membre d’ l’ACAT

– Mireille Brun, membre de l’Association des Amis de la RASD

– Pierre Alain Roussel, syndicaliste

Une rencontre était prévue avec les familles de prisonniers sahraouis. C’est en sortant de la maison de Abdi Asfari, père d’Enaama et ancien disparu sahraoui, jeudi 24 avril à 11h que les membres de la mission ont été arrêtés par la police. Leurs papiers leur ont été confisqués et ils ont été interrogés au commissariat de Tan Tan jusqu’à 23h environ. Ils ont alors été emmennés à Agadir dans “un panier à salade”, un voyage de 5 heures à l’issue duquel ils ont enfin su le motif de leur expulsion décidé par l’Etat marocain, via le Gouverneur de Tan Tan : « risque d’atteinte à l’ordre public ». Les quatre membres qui refusaient d’embarquer ont exigé que le Consul obtienne qu’ils soient attendus à Roissy par un membre du Quai d’Orsay.

Qui croira encore que « Le Maroc a changé », alors qu’hier soir encore un rassemblement avait lieu devant l’Ambassade du Maroc à Paris pour protester contre les atteintes aux journalistes, militants des droits de l’Homme et syndicalistes à l’appel d’organisations marocaines et françaises?