« Cela change les rapports de force »
« A Madagascar, on est sur une île, rattachés à
l’Afrique mais loin de tout. Il m’a fallu quatorze
heures pour faire 80 kilomètres avant-hier… C’est la
première fois qu’une délégation malgache se rend à un
Forum social mondial : on est pleins d’espoir. On ne
voulait pas y aller tant qu’on n’avait pu créer un
espace démocratique par nous-mêmes. »
«Depuis 2005, avec le lancement de notre plateforme, cela change les rapports de force : la consultation des associations n’est plus un gadget, mais un préalable. On est impliqués dans l’élaboration et le pilotage de
projets. Il y a cinq ans, la Banque mondiale avait lancé un projet de 600 forages dans le sud de l’île. On a mis cinq ans pour expliquer qu’il fallait tenir compte des besoins de chaque communauté locale. On l’a fait seuls, sans l’aide des ONG du Nord, qui sont souvent le bras séculier de leurs gouvernements. On l’a fait, en utilisant nos forces avec d’autres organisations de la société civile africaine.
Dire que les Forums sociaux sont à la base de cet essor, de cette transfiguration, c’est aller un peu vite. Le mouvement s’est fait sur la longueur, dès les années 90, grâce aux Nations Unies et au discours de la Banque mondiale qui ont mis l’accent sur les populations pour changer les choses. L’impulsion altermondialiste a certes contribué à accélérer la prise de conscience, mais il a d’abord fallu qu’on tente de s’émanciper de l’influence du pouvoir, des partis, du gouvernement. On a tellement oeuvré pour affirmer notre indépendance, et cela reste toujours un mouvement délicat ! On vient à Nairobi pour raconter nos expériences et tisser de vraies relations
panafricaines…»