Un ancien diplomate tunisien sera jugé pour torture en France

Un juge d’instruction de Strasbourg a ordonné le renvoi d’un ancien
vice-consul de Tunisie en poste dans la capitale alsacienne, Khaled ben
Saïd, devant les assises du Bas-Rhin pour des faits de torture commis à
Jendouba en 2002, a annoncé jeudi l’avocat de la victime, Me Eric Plouvier.
En fuite, sous le coup d’un mandat d’arrêt international, l’ancien
diplomate devrait être jugé par défaut. Il est poursuivi au titre de la
Convention contre la torture de 1984 qui confère une compétence
universelle aux Etats. Il est accusé d’avoir soumis une femme à des
actes de tortures et de barbarie les 11 et 12 octobre 1996 dans les
locaux de la police de Jendouba dans le nord-ouest de la Tunisie.


Cette décision « est un succès dans le lutte contre l’impunité », s’est félicité jeudi Me Patrick Baudouin, l’avocat de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme lors d’une conférence de presse à Paris.

«Ce procès permettra de mettre en lumière l’utilisation de la torture, systématisée par le régime tunisien qui en porte ainsi la responsabilité», ajoute la FIDH dans un communiqué. La FIDH, la Ligue des droits de l’Homme et la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, soutenant toutes la victime, soulignent aussi la durée anormale de six
ans de l’instruction. Cela ne «s’explique que par la volonté délibérée de l’Etat français de faire obstruction afin de préserver la qualité de ses relations avec la République de Tunisie au détriment de la nécessaire primauté de la lutte contre l’impunité», s’indignent les ONG.

Selon la plaignante, son mari a été détenu et torturé dans les locaux de la police de Jendouba en 1991. Il a par la suite quitté la Tunisie pour la France où il a obtenu le statut de réfugié politique le 6 mai 1996. Son épouse, restée en Tunisie avec les cinq enfants du couple, a été
arrêtée à son tour le 11 octobre suivant et conduite au poste de police.

Dans sa plainte, elle indique y avoir retrouvé quatre femmes de prisonniers qui avaient manifestement été torturées. Elle-même dit avoir fait l’objet d’insultes et d’humiliations, puis Khaled ben Saïd lui aurait ôté son foulard, l’aurait giflée à plusieurs reprises, puis l’aurait confiée à ses subordonnés pour la torturer. Elle
aurait ensuite été contrainte de signer sous la menace une déposition avant d’être finalement libérée le 12 octobre.
Ayant rejoint son mari en France, elle a appris en 2001 la nomination de son tortionnaire présumé à Strasbourg et a porté plainte. AP