Tentatives de couper les ailes de la Révolution tunisienne

On se souvient comment les manifestants n’ont pas relâché leur pression tant que des hommes ayant participé au régime de Ben Ali n’ont pas été éliminés des nouvelles instances politiques. C’était la première étape de la révolution. Aujourd’hui nous assistons à la seconde, celle où les hypocrites de la classe politique et financière occidentale (qui applaudissent au changement du bout des doigts après tant d’années passées à féliciter le dictateur), tentent de remettre en scelle des gens qui ne risquent pas de pousser trop loin les velléités populaires avec l’aide de « l’élite locale » intéressée à l’Affaire.
Alors que le « patron » et ses « sbires » ont été écartés, voilà que les « sous-fifres » réapparaissent à leurs postes ou participent à une séance de chaises musicales à même à jouer la même scène où le peuple tunisien tient un rôle qu’il a rejeté : celui de l’oppressé privé du droit au travail, à l’expression, au logement, à un avenir décent, au bénéfice des richesses de son pays.
Et voilà que les mauvaises habitudes reviennent sans complexe : répression des manifestations pacifiques, arrestations, tortures, impunité pour les crimes et le pillage de la nation …
Des voix s’élèvent que nous recevons et auxquelles nous donnons écho car ce n’est pas la télévision française, les radios et la grande presse qui s’en fera le relai.

Le cri de Fatma BOUAMAIED KSILA

Arrêtez d’insulter notre intelligence !

Il se passe des choses dans les sphères décisionnelles de la nouvelle Tunisie du
14 janvier , des choses qui laissent tout tunisien dubitatif quant aux
décisions, résolutions et nominations prises et déclarées ces derniers
temps….. Et ce doute se transforme en crainte devant tant d’indices qui
traduisent d’une part une volonté nostalgique de l’ère benaliste et d’autre une
incapacité réelle à répondre aux attentes légitimes de notre révolution dans
cette phase décisive que vit notre peuple.

Comment ne pas craindre l’avenir quand nos décideurs à savoir le gouvernement
provisoire actuel et ses proches collaborateurs, choisissent la petite politique
devant les exigences extraordinaires qu’impose la révolution ! C’est le cas lors
de la vague de nominations des délégués dans les différentes régions de la
Tunisie, lorsqu’ils se sont contentés du maintien dans leurs fonctions de la
majorité des anciens délégués benalistes en les confirmant dans leurs postes
actuels ou en les déplaçant vers d’autres lieux…. Notre Tunisie profonde gorge
pourtant de compétences dans tous les domaines, des jeunes et moins jeunes
diplômés qui ne demandent qu’à servir leur pays….Le même esprit a conduit
d’autres nominations enregistrées dans les domaines de la sécurité et la
justice, en faisant toujours appels aux Hommes de Ben Ali….Ignorent-ils que
leurs prédécesseurs ont été déchus de leur fonction pour, entre autres une telle
politique !

Et l’insulte continue encore lorsque ces Hommes décident de remplacer le Conseil
National de protection de la Révolution, alors qu’un consensus national a été
assuré autour de cette instance, pour une Haute Commission, dont les membres ont
été désignés sans la moindre concertation …. Et dieu seul sait sur quelles
bases et selon quels critères ces choix de personnes ont été faits !!

Ainsi quelques Hommes, qu’un concours de circonstances a mis sur la route de la
nouvelle Tunisie décident d’être les portes-paroles de la révolution et d’agir
comme si le pays leurs appartient et agissent en conséquence ! Le sang de nos
enfants n’a pas coulé pour cette petite politique.

Personnellement j’avais des craintes et en suivant les différentes réactions des
uns et des autres, dans différents espaces d’échanges qui ont tous tiré la
sonnette d’alarme quant à l’avenir de notre révolution, mon inquiétude s’est
renforcée.

Tout d’abord, pour le rôle extraordinaire que jouent des Hommes d’ombre qui
mènent la barque d’une main de maître comme ils l’ont fait les six premières
années du règne de Ben Ali, lorsqu’ils étaient aux commandes du pays à faire et
à défaire les gouvernements du dictateur et l’ont épaulé dans les années noires
de la Tunisie . Ces Hommes, sont non seulement de retour, mais agissent comme
jadis en seuls chefs des lieux.

Serait-il, par conséquent un hasard si leur retour coincide avec le départ du
juge Rajhi du Ministère de l’Intérieur et les zones d’ombre qui ont carctérisé
cette affaire ! Et le retour galopant des arrestations arbitraires qui touchent
nos jeunes révolutionnaires ( et personne d’autres) et de la pratique de la
torture dans les différents postes de police ! Sans parler des anciens
mercenaires de Ben Ali qui ont été appelés à occuper des postes clés dans les
différents domaines de la vie politique et notamment la presse, l’appareil
judiciaire et l’administration tunisienne……

Un autre problème s’impose et qui consiste en ces Hommes de savoir auxquels Ben
Ali a fait appel, un jour avant son départ, des compétences et des valeurs sûres
pour le pays…. Seulement ont-ils jamais été des Hommes politiques, ont-ils de
près ou de loin la moindre expérience de l’appareil politique et de ses
rouages…. Autrement dit sauront-ils faire face à cette situation inédite que
traverse notre pays…. Jusqu’à maintenant les réponses ne sont pas au RDV.

Cet handicap se manifeste dans le rapport établi avec la jeunesse
révolutionnaire de la Kasbah, avec qui un seul langage a été établi, celui de la
matraque et de la répression, tournant le dos à cette profonde aspiration
populaire à un changement radical dans la pensée politique et les méthodes
entreprises jusqu’à aujourd’hui.
Il est évident que le manque et même l’absence de confiance exprimée par la
jeunesse tunisienne ne sont pas fortuits et résultent d ‘un constat véridique
partagé par un grand nombre d’Hommes et de Femmes de la société civile
tunisienne….

Et c’est la raison pour laquelle nous disons : Non et mille fois non, notre
liberté, chèrement acquise, est trop précieuse pour les regarder sacrifier notre
révolution sans rien faire !

Paris, le : 30 Mars
2011