Lettre au Président de la République

Le Président de l’AFASPA a adressé une lettre au Président de la République afin qu’il aborde avec le roi et les autorités marocaines les atteintes aux droits de l’homme qui sont perpétrées par les institutions au Maroc et au Sahara occidental.


Monsieur le Président,

A l’occasion de votre prochaine visite au Maroc, je souhaite vous apporter des informations
importantes sur les atteintes aux droits et libertés individuelles et collectives perpétrées par les
autorités du pays sur les populations marocaines et sahraouies, afin que vous puissiez, comme dans
d’autres pays où vous vous êtes rendu, évoquer la question du respect des droits de l’homme.

Au Maroc :
Depuis l’année 2014, l’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH)
est interdite d’activité publique, toute salle publique lui est interdite et les propriétaires des salles
privées sont « invités » à renoncer à louer leurs locaux à cette grande organisation dont l’ex
présidente a été honorée du Prix des Droits de l’Homme par le Secrétaire Général de l’ONU.

En 2014, la jeune militante marocaine Wafae Charaf (26 ans) a été condamnée à 2 années
de prison et 50 000dh de dommages et intérêts à la partie civile (la police) pour avoir porté plainte
pour enlèvement à la suite d’un sit-in de solidarité avec des employés d’une firme de la zone
franche, licenciés pour avoir créé une section syndicale.

Le professeur Maâti Monjib s’est vu interdire par la DGSE marocaine de participer à un
congrès académique sur Historical changes à Barcelone en raison de ses idées et engagements
démocratiques. En signe de protestation et de condamnation de cette nouvelle intimidation qui porte
atteinte à ses libertés fondamentales, il a commencé ce 16 septembre une grève de la faim pour une
durée non limitée.


Au Sahara occidental :
Dans ce territoire non autonome si cessez-le-feu instauré il y a
24 ans n’a pas permis la tenue du référendum d’autodétermination de ce peuple promis à l’origine
pour l’année 1992, l’exploitation illégale des richesses se poursuit tout comme la répression de
l’expression populaire. Aujourd’hui et depuis 18 mois l’accès au territoire occupé de ce pays est
interdit par les autorités coloniales marocaines. Ces dernières semaines un avocat et des élues
espagnols, ainsi qu’une délégation de la Confédération Syndicale Internationale ont été empêchés
de se rendre à El Ayoun pour y rencontrer des syndicalistes sahraouis qui comptaient soulever
diverses questions sociales et économiques. Cela porte à environ 70 personnes interdites ou
enlevées contre leur gré par la police marocaine comme ce fut le cas pour la Secrétaire générale de
l’AFASPA pour laquelle votre ministre des Affaires Etrangères s’est borné à s’en tenir à la version
des autorités marocaines qui ont menti sur les raisons de son enlèvement.

La procédure en cassation déposée en mars 2013 par les avocats des 24 militants
sahraouis condamnés par le Tribunal militaire de Rabat à des peines de 2 ans, 20 ans, 30 ans et la
perpétuité n’est toujours pas à l’ordre du jour alors que le Maroc a aboli cette instance juridique pour
les civils. Un engagement qui satisfait votre diplomatie mais qui n’entre comme tant d’autres que
rarement dans les faits ainsi que l’a souligné le rapporteur de l’ONU sur les Droits de l’Homme.

Les représailles économiques s’ajoutent aux arrestations, tortures subies par les
manifestants pacifiques. Ainsi, l’ex disparue, Fatimatou Mahdi Ahmed, Présidente de l’Observatoire
Sahraoui des Droits de la Femme et de l’Enfant, s’est vu retirer le 20 Août 2015 son agrément de
taxi qu’elle avait obtenu dans le cadre de la réparation et l’intégration spéciale des victimes des
graves violations des droits de l’Homme des années noires du régime du roi Hassan II.

Le procès du jeune militant Salah Lebsir (23 ans) arrêté pour son action en faveur du droit à
l’autodétermination et emprisonné à la sinistre « prison noire » d’El Ayoun, a été reporté en
août 2015 puis une seconde fois le 9 septembre dernier. Il devrait se tenir le 30 septembre prochain.
Nous vous demandons d’intervenir auprès des autorités marocaines afin qu’elles laissent les
observateurs étrangers et les journalistes accéder à l’audience.

Je pense que ces éléments vous permettront d’aborder avec des exemples précis la
question du respect des droits élémentaires au Maroc et de soutenir la nécessité de la tenue rapide
du référendum d’autodétermination du peuple du Sahara occidental.

Veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de mes salutations
respectueuses.

Jean-Paul ESCOFFIER

Président de l’AFASPA