Le numéro 134 (de décembre 2014) d’Aujourd’hui l’Afrique vient de sortir

Le numéro 134 (de décembre 2014) d’Aujourd’hui l’Afrique vient de sortir

A U S O M M A I R E

01. Le Billet. Fanatismes divers et enflures médiatiques (Francis Arzalier)

02. Burkina Faso Compaoré balayé, le Faso se relève (Interview de Fidèle Toe par Danièle Jeammet)

05. Contexte d’Ebola. Ruines des systèmes de santé et avancées de la militarisation (Rosa Moussaoui)

07. Révolution des Œillets et décolonisation (Francis Arzalier)

11. Migrations clandestines. Méditerrannée, Bruxelles ne veut rien savoir (Jean Chatain)

13. Les jeunes, le sexe et la politique en Algérie (Pierre Daum)

15. Dettes de sang. Les troupes coloniales françaises durant les deux guerres mondiales (Robert Lavaud)

19. Ghardaïa. Quand la crise s’étend à toute l’Algérie?! (Robert Malclès)

20. La CGT. Luttes pour la paix et contre les guerres coloniales (Jean-Pierre Page)

22. Riverains des Plantations Bolloré. Union + Solidarité = la force des peuples (Michèle Decaster)

24. Souleymane Koly et l’Ensemble Koteba d’Abidjan (Elisabeth Logié)

26. Quelles perspectives pour le théâtre africain ? (Saran Koly)

27. Notes de lecture (F. Arzalier, J. Chatain, J. Gascuel, M. Houssin, E. Logié, JC Rabeherifara)

31. Flashes d’actualités africaines Robert Lavaud, JC Rabeherifara)

33. Côte d’Ivoire. Le pont HKB inauguré ce mois-ci (M.H., Pierre Sidy)


Le Billet.
Fanatismes divers et enflures médiatiques
Francis Arzalier

L’assassinat d’un touriste français en Kabylie cet été fut un crime inacceptable, qui disqualifie le combat politique intégriste au nom duquel il a été accompli. Mais l’enflure médiatique qui l’a suivi en France a été malsaine et manipulatrice.

Malsaine parce qu’elle appelait en riposte à l’« Union Sacrée » en faveur de la guerre. Comme si les interventions extérieures en Libye, au Sahel, avaient en quoi que ce soit résolu le problème, alors qu’elles l’ont aggravé en multipliant le nombre de Djihâdistes intégristes.

Malsaine parce que les médias suscitaient insidieusement le racisme, en insistant sur l’origine « islamique » de ce crime. Comme si les « Musulmans », français ou pas, étaient tous des « djihadistes » en puissance, et mis en demeure de se justifier de leurs pulsions intégristes. Comme si on avait demandé aux Chrétiens de prouver leur innocence, après les bombardements aveugles commis par monsieur Bush contre les villes irakiennes sous prétexte de défendre « les valeurs judéo-chrétiennes » contre « l’Axe du Mal ».

Malsaine aussi parce que certains « informateurs » irresponsables n’hésitaient pas à suggérer la responsabilité des Algériens, en oubliant que 100 000 d’entre eux ont été victimes des fanatiques intégristes durant la décennie de sang des années 90. En occultant aussi le fait que les terroristes clandestins qui subsistent de façon résiduelle dans les montagnes algériennes ont pratiqué depuis 2005 des centaines de kidnappings. Les victimes n’étaient qu’algériennes, la presse française n’en parlait pas, pour « découvrir » cette réalité lors de l’enlèvement d’un citoyen français.
Malsaine enfin, et hypocrite, parce adiste » se nourrit en Afrique et ailleurs du sous-développement et du chômage autant que du financement occulte des sponsors moyen-orientaux et occidentaux. Comment un jeune réduit à la misère et à l’oisiveté dans les rues de Kidal ou Benghazi pourrait il ne pas être tenté par les revenus confortables et le pouvoir d’une kalachnikov que lui proposent trafiquants et fanatiques de tout poil ? Comment s’étonner que de jeunes Français, qui entendent depuis des années vanter les mérites des valeureux insurgés islamistes contre le méchant dictateur Bachar El Assad, courent jusqu’en Syrie les rejoindre pour compenser le vide de leur vie dans la France actuelle, ou tout s’achète et se vend ?

Le Monde du 8 septembre 2014, qui menace les Français à pleines pages du Grand Loup djihâdiste, révèle en un entrefilet de six lignes que la France est le premier des pays d’émigration vers Israël, avec plus de 5 000 départs au total en 2014. Parmi eux, des centaines de Français rejoignent les colonies sionistes, implantées par la force en Cisjordanie palestinienne, et des dizaines de jeunes français sont allés participer à l’offensive de l’armée israélienne à Gaza.

En quoi est-il plus grave de rejoindre les bandes islamistes de Syrie ou d’Irak que d’aller contribuer sciemment au vol des terres palestiniennes et à l’écrasement des familles gazaouies sous les bombes ?
Le mouvement progressiste français de 2014 doit s’interroger : pourquoi a-t-il été incapable de donner à ces jeunes du XXIe siècle un rêve, une raison de vivre et de mourir, et laisse t’il ce soin au fanatisme « religieux » le plus fascisant ?