Libérer des personnes qui n’auraient jamais dû aller en prison ne relève pas d’un geste d’humanité, mais permet de cacher la réalité peut-être oubliée de la population marocaine et surtout à l’étranger. Car ce sont par centaines que l’on compte les prisonniers d’opinion qui croupissent et sont victimes de maltraitances et tortures dans les geôles du roi.
En premier lieu il faut savoir qu’il y a eu 790 condamnations suite aux manifestations du Hirak ; les prisonniers libérés étaient parmi ceux qui avaient les plus courtes peines. Les leaders du mouvement qui ont écopé de 10, 15 et 20 ans de prison sont toujours sous les verrous, tout comme les habitants de Jerada et de Zagora qui, eux aussi, ont conduit un mouvement de protestations du fait de la marginalisation de leur région.
Aucun journaliste, aucun étudiant de l’UNEM,aucun islamiste non violent n’ont bénéficié de cette grâce.
C’est également le cas des prisonniers politiques sahraouis qui sont une cinquantaine dispersés dans 6 prisons. Seulement 3 d’entre eux purgent leur peine dans leur pays à la « prison noire » d’El Ayoun. Les autres sont éloignés de leur pays. Leurs familles et leurs amis doivent faire des centaines de kilomètres pour les visiter et leur apporter une assistance.
C’est le cas des 19 membres du groupe de Gdeim Izik qui ont été dispersés aux quatre coins du Maroc après la sentence du tribunal de Salé en septembre 2017. Ils ont entamé 8 grèves de la faim pour protester de cette nouvelle brimade. Les acquis sur leurs conditions de détention obtenus après de longues grèves de la faim ont été remis en cause lors des différents transferts qu’ils ont connus.
Le roi Mohamed VI aurait été bien inspiré de suivre les prescriptions du Comité contre la torture de l’ONU qui, en décembre 2016, a condamné le Maroc pour les aveux obtenus sous la torture de Naama Asfari, qui ont constitué les seules preuves de culpabilité sur lesquelles est basée la condamnation à 30 ans de prison. Le Comité de l’ONU a exigé une indemnisation pour les préjudices subis, exigence restée sans suite. Mais les fêtes religieuses et les anniversaires du trône se suivent et aucun prisonnier sahraoui n’a droit à une quelconque grâce.
Et si cela ne suffisait pas à leur malheur, des étudiants arrêtés à Marrakech ont été bastonnés par les gardiens de la prison d’Ait Melloul le jour de Laid.
Le statut de prisonnier politique n’existe pas pour les autorités marocaines, car il n’y en a pas : toute personne qui conteste la mauvaise gouvernance du pays, les atteintes aux droits humains,la corruption,revendique le droit de vivre dignement ou le droit à l’autodétermination, est taxé de criminel.