Au-delà des regrets. Décrypter l’histoire du colonialisme pour combattre le racisme

A l’occasion des 60 ans de l’indépendance de la République Démocratique du Congo, le roi de Belgique a adressé une lettre ouverte au peuple congolais, via le président Félix Tshisekedi dans laquelle il qualifie étrangement d’«époque de l’Etat indépendant » les années où son aïeul, le roi Léopold II avait fait du Congo sa propriété privée et mis en place un régime basé sur l’exploitation du caoutchouc par le travail forcé !


Philippe de Belgique reconnaît qu’à cette époque « des actes de violence et de cruauté ont été commis, qui pèsent encore sur notre mémoire collective. La période coloniale qui a suivi a également causé des souffrances et des humiliations », (…) « Je tiens à exprimer mes plus profonds regrets pour ces blessures du passé dont la douleur est aujourd’hui ravivée par les discriminations encore trop présentes dans nos sociétés ». Il compte mettre en place une commission parlementaire chargée d’examiner la mémoire coloniale avec des experts belges et africains. En 2000-2001, une commission d’enquête parlementaire belge avait conclu à la «responsabilité morale » de « certains ministres et autres acteurs» sur le contexte de l’assassinat en janvier 1961 de Patrice Lumumba, Premier ministre du Congo indépendant.

L ‘Allemagne est le seul État colonial à avoir reconnu le 10 juillet 2015, que les massacres tendant à l’extermination des populations, commis entre 1904 et 1908 par son armée en Namibie, étaient « un crime de guerre et un génocide ».

Il est indispensable qu’au-delà de la reconnaissance et des excuses, du déboulonnage de statues et du remplacement de plaques de rues, un travail global soit effectué sur les stratégies des puissances colonisatrices. Elles ont toutes adopté des dispositions (de l’évangélisation à l’usage de la chicote) pour conquérir et piller les territoires, maintenir leur domination sur les peuples, instituer le travail forcé, réprimer les résistances et les luttes de libération nationale et enfin mis en place des mécanismes de régulation avec le soutien d’« élites » locales cooptées. Dans le même temps les puissances coloniales se sont assurées de la neutralité, au mieux de l’adhésion, de leurs propres peuples ; d’où l’élaboration du racisme, légitimé par des scientifiques qui ont prêté leur concours à la conquête coloniale.

L’AFASPA se prononce pour qu’un travail interdisciplinaire entre les pays aujourd’hui indépendants et des anciennes puissances coloniales ait lieu. Il devra associer historien.ne.s, journalistes, juristes, avec le concours d’hommes et femmes encore vivant.e.s. et les témoignages enregistrés de celles et ceux qui ne sont plus.

Bagnolet le 9 Juillet 2020