La coordination des associations et comités sahraouis
des droits humains dans les territoires occupés
du Sahara occidental s’adressent solennellement au Président de la république française
Monsieur le Président,
Vous avez récemment déclaré à la presse que la position de la France sur le conflit du Sahara occidental « était connue et ne changerait pas », alors que depuis des années la France s’oppose à ce que la MINURSO soit dotée du volet de surveillance de la situation des droits humains,
Vu l’influence de la France sur la résolution de la situation de notre pays, inscrit par l’ONU sur la liste des territoires non-autonomes, il nous a semblé important de vous informer sur la situation de notre peuple dans les territoires occupés depuis l’invasion marocaine en 1975.
Les droits fondamentaux édictés par les Nations Unies dans des pactes ratifiés par le Maroc, sont bafoués par les autorités marocaines au Sahara occidental occupé :
Non respect du pacte des droits civils et politiques
– Droit à l’autodétermination (article 1).
Le plan de paix adopté par l’ONU et l’OUA prévoyait la tenue d’un référendum en janvier 1992; 25 années plus tard, il n’a pas vu le jour et les manifestants pacifiques qui réclament l’application de ce droit imprescriptible et inaliénable, sont systématiquement et violemment réprimés.
– Droit de constituer une association.
L’ASVDH, seule association sahraouie opposante à la présence marocaine au Sahara occidental, a reçu un récépissé de déclaration après des années de procédures judiciaires.
Droit d’expression et d’opinion.
Des centaines de citoyens sahraouis, activistes du droit à l’autodétermination et des droits de l’homme, journalistes, blogueurs, syndicalistes sont arrêtés, incarcérés, torturés, humiliés en public et dans les locaux des administrations policière et judiciaire.
L’État marocain persiste à interdire l’accès au Sahara Occidental aux observateurs internationaux afin de documenter les violations des droits de l’Homme. L’expulsion ou l’interdiction d’accès à plus de 120 observateurs internationaux de diverses nationalités depuis 2014. Le dernier exemple est l’expulsion de deux universitaires japonais le 29 décembre 2017
– Droit à une justice équitable.
La Justice marocaine enfreint régulièrement ses lois et les conventions internationales ratifiées par l’État Marocain. Il en fut ainsi des procès des 25 prisonniers du groupe de Gdeim Izik qui ont été arbitrairement traduits devant le tribunal militaire de Rabat, puis devant la cour d’appel à Salé, alors que les faits retenus contre eux se sont déroulés à proximité d’El Aiun et qu’ils auraient dû être jugés par le tribunal de cette ville en application du droit international humanitaire qui prévoit que les ressortissants d’un territoire occupé ne peuvent être jugés dans le pays qui les occupe.
Actuellement 54 prisonniers politiques sahraouis ont été condamnés, certains à de lourdes peines de prison, à l’issue de procès, dont les chefs d’inculpation non fondes aussi bien que les procès-verbaux de la police, fabriqués de toutes pièces, et des’aveux extorqués sous la torture. C’est ce qui a conduit le Comité contre la torture de l’ONU (CAT) à condamner le Maroc, suite à la plainte du militant et juriste Naâma Asfari, condamné à 30 ans de prison. Le CAT a appelé le Maroc à libérer et à indemnise l’intéressé. Non seulement il est toujours incarcéré, mais il est depuis, l’objet d’une plainte pour diffamation.
– Non respect du pacte des droits sociaux-économiques et culturels :
– Droit au travail.
Nombreux défenseurs des droits de l’homme ont été licenciés arbitrairement de leur emploi pour leurs activités politiques.
Des centaines de diplômés-chômeurs manifestent régulièrement dans les villes sahraouies pour revendiquer leur droit au travail. Ils dénoncent la discrimination contre eux lors de l’embauche dans des secteurs d’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental (pêche, mine de phosphate et d’or, agriculture),
– Droit au respect de la culture et l’histoire.
– Les programmes du système éducatif marocain ne tient pas compte du statut juridique du Sahara occidental, ni de l’histoire de ses symboles historiques. La richesse de la poésie Hassanie n’est pas enseignée dans les cours de littérature.
– L’épuisement des ressources naturelles
L’État marocain persiste dans sa politique d’épuisement des ressources naturelles, en particulier le phosphate, avec une production allant jusqu’à 3 millions de tonnes par an, et attire la main-d’uvre marocaine en occultant les habitants Sahraouis.
Les stocks de poissons au large des côtes du Sahara Occidental connaissent une surexploitation, due à des décennies de pêche intensive par les flottes marocaines et étrangères, en particulier les flottes de l’Union Européenne.
C’est pourquoi nous vous demandons, Monsieur le Président, de mettre un terme à cette anomalie et à cette injustice, en tant que chef d’État membre du Conseil de sécurité, et de connaître et respecter les obligations du droit international pour aider le peuple sahraoui à lui permettre de déterminer librement son sort par la garantie de son droit fondamental à l’autodétermination. Et aussi en tant que membre et pays fondateur de l’Union Européenne, nous vous demandons de respecter la décision de la Cour européenne de justice et d’arrêter les manuvres françaises impliquées dans l’épuisement des ressources naturelles de ce peuple sans son consentement ni le consentement de son légitime et unique représentant le Front Polisario.
Monsieur le Président de la République française, nous espérons que vous prendrez en considération notre lettre, et que vous répondrez à nos préoccupations.
El Aaiun le 22 janvier 2018