Monsieur le Président,
Les autorités marocaines ont entamé une tournée européenne de promotion d’un « plan d’autonomie » pour le Sahara Occidental qui est une nouvelle version, éternellement reformulée, de leur refus de respecter les résolutions de l’ONU.
Après en avoir pris connaissance, vous avez déclaré qu’il s’agissait d’une « solution constructive pour le Sahara Occidental ». Nous sommes au regret de constater que vous persistez à ne tenir aucun compte de l’Histoire des trente dernières années au cours desquelles, à l’intérieur comme dans l’exil, le peuple du Sahara Occidental a fait preuve de sa détermination à user de son droit imprescriptible : celui de se s’autodéterminer.
Aucun roi marocain, aucun président dans le monde n’a pu et ne pourra infléchir cette volonté partagée par les sahraouis, toutes générations confondues. Il est illusoire de prétendre que ce peuple rebelle à toute domination extérieure se laissera un jour bâillonner.
L’Intifada qui brave une répression féroce depuis mai 2005 en est la parfaite illustration. La réaction estudiantine à la démarche marocaine ne s’est pas fait attendre, une nouvelle manifestation a eu lieu à El Ayoun le 13 février dernier au cours de laquelle les étudiants brandissaient des drapeaux de la République Arabe Sahraouie Démocratique ; ces jeunes, qui n’étaient pas nés lors de l’invasion de l’armée marocaine, n’hésitent pas à accrocher les couleurs de la RASD aux bâtiments officiels. Les forces de police qui tabassent femmes et enfants, peinent à recouvrir les slogans indépendantistes qui fleurissent sur les murs des villes, à ramasser les multitudes de « papillons » lancés à travers les rues qui réclament le départ de l’occupant… jusque dans les prisons on résiste ; ainsi, depuis deux semaines les détenus politiques de la sinistre « prison noire » observent une grève de la faim.
Cette évidence, les autorités de la France se refusent à l’admettre. Pour preuve, le refus du Ministère des Affaires Etrangères de recevoir au mois de novembre dernier Madame Aminatou Haïdar, militante des droits de l’Homme, elle-même victime de l’appareil répressif marocain qui aurait pu donner une autre version de la situation que celle que lui sert régulièrement la diplomatie marocaine.
Que l’Etat marocain persiste dans sa velléité de maintenir une domination coloniale sur le pays voisin, illégalement annexé, est en soi une forfaiture, que la France persiste à la soutenir est non seulement anachronique, mais constitue un jeu dangereux pour la sous-région. Notre pays s’honorerait à travailler à l’apaisement et au règlement des foyers de tension en Afrique au lieu de les attiser en soutenant les velléités des pays expansionnistes. Votre attitude tourne le dos à cette option et obère le futur des rapports entre les peuples de France et du Maghreb.
Nous vous demandons par la présente, Monsieur le Président, d’uvrer au respect du Droit international et des résolutions de l’ONU pour le Sahara Occidental.
Recevez, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations distinguées.
Jean Paul ESCOFFIER
Président