D’anciens détenus politiques marocains saisissent l’Union Européenne qui a accordé un statut avancé à leur pays alors qu’il ne respecte pas les critères sur les droits de l’homme pour cet octroi. Dans cette lettre ils expliquent comment ils continuent leur Lutte pour leur réintégration sociale après des années de détention et de tortures.
L’Union Européenne qui, selon son discours, avance que le respect des Droits Humains est un critère principal dans ses relations extérieures, politiques et économiques avec les autres pays a accordé au Maroc le «privilège» d’un partenaire à Statut Avancé sans se soucier de l’état des droits Humains au Maroc, dont notre situation sociale dégradée n’est qu’un exemple de la réalité des violations que subissent les Droits Humains dans notre pays.
Nous, ex-détenus politiques, nous vous présentons dans cet appel notre situation sociale dégradée depuis notre libération.
Notre détention arbitraire, était un abus violent et illégitime. Notre détention arbitraire est survenue pendant la plus importante phase de notre vie où nous nous engageons à être responsables pour réaliser une vie sociale stable où nous espérions un meilleur avenir pour nous et pour notre peuple.
Presque tous les détenus étaient en phase de formation estudiantine quand les arrestations et les tortures ont détruit notre jeunesse et notre espoir en un avenir meilleur.
Les arrestations et les tortures étaient une brutale coupure entre notre vie et la vie normale d’une société démocratique à laquelle aspire notre peuple et à laquelle nous oeuvrions.
Notre libération survenue après tant d’années d’emprisonnement, de grèves de la faim, de luttes dures pour une vie carcérale humaine pour que nous nous trouvions dans une situation sociale détériorée et état de santé dégradé car notre intégration sociale souffrait et souffre encore le martyr à cause des pratiques du Pouvoir et de son gouvernement qui marginalisaient notre intégration sociale selon les recommandations de L’Instance Equité et Réconciliation (IER) installée par le Pouvoir lui-même.
Nos conditions de santé, abîmées par les séquelles des tortures, des grèves de la faim et l’état de la détention, ne font que se dégrader. En conséquence, certains de nos camarades, sont atteints de maladies chroniques. Nos souffrances s’approfondissent après notre libération. A cause de la précarité de nos conditions sociales.
Et malgré tout nous n’avons guère cessé de militer pour jouir d’une intégration sociale juste et équitable.
Le gouvernement marocain s’est engagé suite à sa décision datée du 25 décembre 2002 de répondre par des actes à notre intégration sociale juste et équitable et à résoudre nos problèmes de travail, de retraite, d’ancienté… Mais malheureusement, et jusqu’à nos jours le gouvernement n’a pas honoré ses engagements.
Ainsi les cas intégrés à la fonction publique subissent le calvaire des basses échelles et des bas salaires qui n’assurent guère une vie digne face à la cherté galopante du coût de la vie.
Dans la foulée de cette situation, notre camarade Mohamed Aabbad est décédée au mois de mars 2006 suite à l’absence totale d’une couverture médicale des ex-détenus politiques dont l’état de santé ne cessait et ne cesse de se détériorer après les tortures subies pendant la détention secrète et l’emprisonnement arbitraire.
D’autres cas, sans travail, subissent les affres de la vie.
La mort de Abderrahim Alloul, décédé le 12 mai 2011 suite au manque de soins appropriés démontre la négligence et les tergiversations avec lesquelles Le Pouvoir et son gouvernement approchent nos revendications à une intégration sociale juste et équitable comme le stipule les recommandations de L’IER.
Nous subissons actuellement des conditions sociales de précarité qui frappent l’ensemble de notre groupe suite à nos positions politiques qui ne daignent guère se soumettre au clientélisme politique officiel ou autre et ce malgré les recommandations de l’Instance Equité et Réconciliation et ses décisions qui rendent, plus ou moins justice aux victimes des graves violations des droits humains qu’a connues le Maroc!
Nous appelons L’Union Européenne à respecter ses engagements en exigeant clairement de L’Etat Marocain de honorer ses engagements au respect et à l’application réelle des recommandations de L’Instance Equité et Réconciliation que les gouvernants marocains ne cessent de vanter devant Le Parlement Européen.
Nous réitérons notre attachement inébranlable à une vraie assurance médicale et à l’exécution globale et juste immédiate de notre réintégration sociale, essence d’une vraie réhabilitation que L’IER a élaborée, théoriquement, dans les recommandations de son rapport approuvé officiellement par le roi en janvier 2006.
Mais dès lors, et malgré nos efforts titaniques qui ne cessent de chercher inlassablement toute possibilité d’une réintégration sociale digne et équitable qui répond à nos capacités et formations acquises pendant la période de détention par notre persévérance et les sacrifices de nos familles, nos conditions de vie ne font que se détériorer, notre morale abîmée par la marginalisation et la déception de par notre situation parce que nous sommes devenus un fardeau pour nos familles et pour nous même.
Nous considérons que notre réhabilitation approuvée par les recommandations de L’instance Equité et Réconciliation et par Le chef de l’Etat ne sera réelle que par notre réintégration juste et équitable selon deux critères fondamentaux
Le recouvrement des occasions et opportunités de réinsertion sociales bafouées par la détention secrète, la torture, les procès inéquitables et l’emprisonnement arbitraire.
La stabilité sociale et la dignité
L’application de ces critères universels, adoptés théoriquement par L’instance Equité et Réconciliation, sont seuls aptes à garantir une vraie réhabilitation et une vraie réintégration sociale des victimes des violations graves des Droits Humains.
Signataires : Naridah Khalid, El Hajji Othman, Chbari Abdelmoumen, Mouftah Abdelmajid, Lmkhalfi Abdellah, Said Hassan, Badaoui Youssef, Guenich Said, Mendabisse Rachid, Bouziani Jamal, Skiti Kamal, Manaf Abdellatif
Comité local de la Voie Démocratique Paris