En Tunisie et en Egypte, les peuples faisant preuve d’une grande maturité politique, se sont libérés eux-mêmes des tyrans qui les opprimaient depuis des décennies. Dans d’autres pays d’Afrique : au Sahara Occidental, au Burkina Faso, au Maroc, au Sénégal, à Djibouti des révoltes et des mouvements sociaux ont exprimé une même volonté de liberté, de démocratie et de progrès social.
En Libye la révolte a démarré à Benghazi en février 2011 contre le régime en place, immédiatement soutenue par la France qui a reconnu un Conseil National de Transition autoproclamé.
Le Président français a pris l’initiative de déposer devant le Conseil de Sécurité de l’ONU une résolution pour une intervention militaire visant « à empêcher le massacre de populations » en confiant cette mission à l’OTAN.
Les frappes des avions français et anglais ont détruit de nombreuses infrastructures (hôpitaux, écoles…). Elles ont fait plusieurs dizaines de milliers de victimes civiles sciemment occultées par les médias occidentaux qui se cantonnent à comptabiliser celles des troupes de Khadafi. Pourtant l’enquête en cours d’Amnesty International dévoile les massacres perpétrés sur les sympathisants du régime et les Subsahariens soupçonnés d’être des mercenaires à la solde du Guide libyen.
Ce n’est pas la reconnaissance du CNT par un certain nombre de pays qui fait sa légitimité sur l’ensemble du territoire libyen. Outre les diversités des composantes du CNT il faut noter dans les grandes villes comme dans l’Ouest du pays des motivations d’origine diverses alimentant le mécontentement et la rancune des populations à l’égard de l’autocrate libyen. Le seul objectif commun n’a jamais annoncé est l’élimination du chef libyen, ce qui est loin de représenter un programme politique et encore moins un projet de société sur des bases démocratiques et des règles assurant la souveraineté du peuple.
La France porte une lourde responsabilité devant l’Histoire, non seulement au regard de la Libye mais également de ce qui pourrait devenir une règle bafouant le droit international et celui des peuples à décider de leur avenir. Elle s’engage dans une diplomatie va-t-en- guerre dont l’objectif est essentiellement économique. Les menaces proférées à l’égard de l’Iran sont inquiétantes pour la Paix dans le monde. L’intervention militaire des deux anciennes puissances coloniales que sont la Grande Bretagne et la France, est dans la continuité de celle menée par les USA contre l’Irak sous prétexte d’anéantir des armes de destruction massive qu’ils savaient inexistantes. En Libye a été ouvert un nouveau chantier d’aventurisme et d’expérimentation militaire : Il s’avèrera rapidement incontrôlable. Cette ingérence impérialiste dans une guerre civile avec fourniture d’armes à des groupements divers et variés aura sans nul doute de lourdes et durables conséquences.
La finalité de l’intervention militaire en Libye vient d’être dévoilée à la conférence de Paris, dite « des amis de la Libye » : l’accaparement de la manne pétrolière et gazière du pays que Mouamar Khadafi gérait selon ses choix. D’où la présence de Total et GDF-Suez sur les rangs des nouveaux prétendants qui ne manqueront pas de participer à la réunion annoncée le 6 septembre à Paris pour discuter des « projets du CNT ». A la conférence de Paris qui s’est auto-légitimée étaient convoqués des chefs d’Etat qui n’ont jamais brillé dans la défense de la démocratie, du respect des droits de l’homme et la souveraineté nationale.
L’AFASPA restera attentive à l’émergence de forces démocratiques libyennes et continuera à dénoncer les ingérences politiques, économiques et militaires ainsi que les violations graves aux droits humains sur les populations libyennes et étrangères.
Bagnolet le 3 septembre 2011