MADAGASCAR.
LA BANQUE MONDIALE VEUT LIBÉRALISER LE MARCHÉ FONCIER MALGACHE
Pendant que l’opinion publique s’inquiète du contenu final des amendements à la nouvelle loi foncière relative aux propriétés privées non titrées, qui devraient être adoptés au cours de la session parlementaire en cours, un document de la Société Financière Internationale (SFI) et de la Banque Mondiale intitulé « Diagnostic du Secteur Privé - Créer des marchés à Madagascar » publié en décembre 2021, provoque d’importantes préoccupations. Comportant des recommandations sur la « réforme » de plusieurs lois, afin que les investisseurs étrangers puissent devenir propriétaires de terres malgaches, les parties de son contenu en lien avec les terres méritent d’être portées à la connaissance de tous et d’être dénoncées. Ceci nous rappelle que la Banque Africaine de Développement avait émis comme condition d’attribution d’un financement du Programme d’Appui à la Compétitivité Economique (PACE) en 2019 l’adoption par les dirigeants malagasy de textes règlementaires relatifs aux agropoles. Les impacts dramatiques d’une éventuelle application de ces propositions inacceptables sur l’appauvrissement de la population déjà démunie nécessitent une large information et des débats. Pour le Collectif TANY pour la défense des Terres malgaches, les lois envisagées permettraient aux investisseurs étrangers de devenir propriétaires des terres. La société civile malgache veut protéger les terres face aux investisseurs étrangers. Le Collectif TANY pour la défense des Terres malgaches, issu de la société civile, s’oppose dans un communiqué à ce que les investisseurs étrangers puissent devenir propriétaires de terres malgaches. C’est ce que recommande pourtant la Société financière internationale (SFI) dans un rapport. La mise en œuvre de cette recommandation, d’après la société civile, pourrait avoir in fine des répercussions négatives sur l’agriculture malgache. Selon la loi malgache actuelle, les investisseurs étrangers n’ont pas le droit de devenir propriétaires de terres à Madagascar. Pour encourager leur venue et par là stimuler le secteur privé, ralenti par deux ans de pandémie, la Banque mondiale propose donc de libéraliser le marché foncier malgache. Pour Marcelle Ayo, la représentante de la Société financière internationale (SFI), une organisation du Groupe de la Banque mondiale, à Madagascar : « Bien sûr que les Malgaches doivent d’abord posséder leurs terres, mais il y a suffisamment de place pour de plus grosses exploitations agricoles. C’est aussi pour rendre le cadre légal clair pour les investisseurs étrangers qui de toute façon contournent cette interdiction . Ça fait perdre de l’argent à tout le monde. » Pour le collectif TANY, bien au contraire, une telle mesure mettrait en dangers les droits économiques, culturels et sociaux des Malgaches. Les trois quarts de la population vivent du travail de terre, rappelle le collectif. L’inégalité entre les grosses entreprises et les plus petits paysans locaux serait insoutenable. « Assurer un meilleur accès à la terre pour que les communautés locales puissent vivre dignement et nourrir la nation ne peut pas être confondu avec la mise en place des "marchés fonciers" à la sauce néolibérale », dénonce encore le collectif TANY. Pour modifier le régime foncier malgache, il faudrait par ailleurs changer deux lois, controversées. La société civile s’inquiète d’une présentation impromptue de ces textes déjà modifiés à l’Assemblée nationale pendant la session parlementaire en cours.